Michel Boutet is alive, and well, and living in the Maine-et-Loire.
Et si c’est une nouvelle pour vous, alors vous avez bien de la chance.
Pour tous ceux qui vivent déjà en compagnie de ce bel humain, ceux qui ont mis depuis longtemps leurs pas dans ceux de Jean-Guy Douceur, de Roger-la-Quille, Fanch Languennec ou Jo l’Africain, ceux qui ont regardé Leïna serrer doucement dans ses bras les oiseaux maladroits, ceux qui ont un jour bu un coup au comptoir avec un artilleur de Mayence ou reçu une carte postale de Lourdes signée de Josette Dussouille, Le Silence du fleuve est un moment de bonheur attendu depuis un peu plus de cinq ans —Michel Boutet est un artisan soucieux et sourcilleux qui vous refera tout le mur si la pierre en bas est mal fichue—, attendu depuis qu’il distille sur l’une ou l’autre scène un titre que tiens ! on n’avait pas entendu, c’est sur quel disque, ça ? le prochain peut-être… Eh bien voilà, le prochain, il est là. L’année 2014 s’est achevée là-dessus, elle n’avait plus rien à faire de mieux.
Mais si vous allez découvrir Michel Boutet avec ce dernier et superbe album, alors préparez-vous à être heureux.
Le Silence du fleuve est un disque magnifique. Je suis toujours épaté par les gens qui savent vous parler d’un vin, mettre des mots sur des sensations complexes et emmêlées. Ecouter Le Silence du fleuve, c’est un peu ça. C’est d’abord une expérience sensuelle, immédiate. Les mots pour en parler viennent après. Ou pas, mais ça n’est pas grave. Le plaisir est là. Les tonalités s’y mélangent, comme toujours chez Michel Boutet. C’est généreux toujours, drôle souvent, grinçant parfois, c’est tendre vertueusement, et c’est surtout remarquablement écrit. Si Delphine Coutant qui l’a si bien accompagné y vient encore le temps d’un clin d’œil complice, Michel a ouvert portes et fenêtres pour cet album, et a manifestement pris plaisir à s’entourer d’autres compagnons artisans avec qui soigner les choses. Des évidences — son superbe pianiste Jacques Montembault, Jean-Pierre Niobé, l’ami Jean-Michel Piton, Lionel Dudognon qu’il retrouve après l’album Aime-moi de 1986 (!) — des découvertes aussi comme celle de Cyril Sarot qui lui a prêté ses mots sur quatre titres (ça, c’est une rencontre ! Mes copains de caboche, par exemple, c’est tellement du Boutet !), ou une belle Jeanne de 15 ans, la fille de Jacques Montembault, qui a donné musique à cette bien jolie Petite Italienne qu’il dédie à Francesca Solleville.
Le Silence du fleuve, si je ne me retenais pas, je vous en dirais du bien.
Jean-François Grandin